Un point c’est tout.

Il est important de faire le point sur un sujet que l’on aurait tendance à mettre trop souvent entre parenthèses.

Cette mise au point tombe à point, elle était nécessaire pour rendre aux signes toute leur vigueur.

Qu’est-il de plus divers qu’un point ? Un point ; c’est tout.

Ça se fait, ça se double, c’est central, ça tricote, ça coût, ça reprise, ça culmine, c’est bon ou c’est mauvais, c’est rond, ça se colle aux virgules, ça questionne, ça affirme, ça s’exclame, ça compte, ça dit le manque, ça localise, ça repère, çà tombe où il faut, ça remet les choses en place, parfois ça doute et ça reste en suspension, ça se perche sur les i, ça rend les trémas archaïques en dénudant la naïade tout en faisant de Caïn un fratricide.

Un point, ça redonne du souffle à une phrase qui s’essouffle, ça permet aux amoureux dont la flamme s’émousse de prendre un second souffle, ça fixe des repères sur la carte de la vie, et puis, un jour, vient le dernier, celui qui marque le passage du noir des choses que l’on avait à dire au blanc des choses qu’on ne dira plus.

Le point, ça met les mots en musique, ça module les phrases pour qu’elles chantent plus qu’elles ne disent les choses de la vie.

Une phrase, c’est comme un tas d’olives dans un souk de Marrakech. Si on veut que les autres l’aiment, il faut de chaque lettre brille comme un fruit neuf, que les mots soient bien rangés, que les lettres soient parfumées, que ça soit beau à voir, un plaisir pour les yeux.

Une phrase, ça a des courbes, des lignes, c’est comme le corps d’une danseuse, ça ondule, se tord, se redresse. Ça vit puisque ça donne envie.

Une phrase, ça respire, ça glisse sur le papier en tirant la musique des mots, ça met bout à bout des bribes sans couleurs sur la portée des choses à dire pour en faire des choses dites avec amour, avec humour, avec légèreté… alors, les gens qui ne finissent pas leurs phrases ne peuvent aimer ni la danse, ni la musique.

Ils ne peuvent pas non plus aimer les couleurs puisque les couleurs c’est la combinaison de milliers de points sur la fadeur originelle. Les mots, ça peut être bleu comme une orange, ça peut être rouge quand ça gueule la colère, ça peut être un peu safran quand c’est ni bleu ni rouge, quand c’est des demi-mots, des mots dits à demi ou des mots à demi dits…

Les mots, quand c’est rangé dans une phrase, c’est un peu comme une rangée d’épices, pointu comme des pyramides, rond comme des poitrines pleines de vie.

D’ailleurs, les mots ça peut avoir du goût si on a pris le temps de mettre au point la recette. Ça peut être sucré comme des épices. Ça peut aussi être amer ou rugueux parce que c’est vrai, comme les mains d’un paysan qui cueille les épices que d’autres vendent sur les marchés.

Fermons les guillemets…

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