Il y a des mondes
Posted on 2 août 2015 in Un jour
Il y a des mondes qui au départ ne sont pas faits pour se rencontrer.
Des mondes bien séparés, où tout a sa place. Des mondes réglés comme du papier à musique.
Des mondes qui n’entrent pas dans les mêmes réalités, ou plutôt qui ne se croisent que dans des glissements du temps et de l’espace.
Un jour, tout se dérègle, il y a des failles, des moments où ces deux mondes deviennent perméables sans qu’on le veuille vraiment. Des réalités opposées se mêlent pour un temps dans un univers surgi de nulle part si ce n’est l’instant, et nous entrainent dans une aventure où le mouvement et l’immobilisme se fondent et se confondent dans une surprenante synthèse du réel et du figuré.
Il suffit de s’assoir quelque temps face à la fresque de la place Royale, dans le vieux Québec, pour se laisser entraîner dans un étrange voyage au croisement de deux mondes.
Sur cette œuvre gigantesque, on dissocie mal les personnages qui sont peints sur le mur de ceux qui les regardent depuis la place. Les limites s’effacent, les lignes se confondent, l’espace devient flou, poreux, incertain. Le mouvement change de camp, l’immobile s’anime tandis que le geste se fige dans un ballet d’un autre temps.
C’est un étrange mélange, un brouillage des réalités, un rapprochement subtil et inattendu. On dirait que les personnages vont se rencontrer dans une quatrième dimension, un monde intermédiaire entre le monde de l’image, celui du mouvement et celui de la fugacité d’un moment qui brouille les cartes du temps et de l’espace.
Si l’on prend le temps d’entrer dans la magie du tableau, on a l’impression que les badauds vont se fondre dans la fresque tandis que les personnages s’en échappent sans qu’on puisse rien faire pour les contenir.
On dirait que les personnages de l’histoire ont échappé aux artistes qui les dessinaient tout vivants tandis que les passants tentent de se frayer un chemin pour partager leur part de jeunesse éternelle.
Ici, la réalité est illusion, tandis que l’illusion devient réalité. Il suffit juste de trouver sa place entre les deux.
Québec, juillet 2015