Le chant des mondes

Le chant des mondesAujourd’hui, les mondes se divisent sur un miroir de brumes.

Aujourd’hui, les nuages se sont posés dans l’ombre des vallées, histoire de toucher le fond et le monde d’en bas.

Ce matin, les nuages effleurent le cours de la rivière et s’étirent sur ses berges engourdies.

Le monde d’en bas attend, se tait, se terre, écoute les bruits de brume. Les branches des saules se courbent sous le givre.

La lumière cherche sa voie dans des halos de clarté éphémère,  tâtonne, hésite, pousse son avantage et bute sur le banc de brume resserrée.

Ici, la lumière prend forme, l’invisible devient visible dans la lourdeur du temps qui la rend inutile. La lumière s’éclaire plus qu’elle éclaire, se fond et se disperse dans le froid du matin.

Sur le sorbier aux fruits givrés, la grive se tait, perdue dans le couvert de brume. Seul quelques merles engourdis pagaillent les buissons chargés de grains de givre.

C’est le monde d’en bas.

En haut, tout est lumière.

Le soleil fracasse ses rayons sur la mer des nuages, la lumière revient, irisée par le miroir des brumes, c’est le concert des ondes qui dardent leurs rayons.

Il fait beau, l’herbe se gorge de perles de rosées, les chardons étincellent et déchirent le temps de leurs griffes acérées.

Au loin, les montagnes crèvent le plafond des nuages et paraissent flotter sur la mer argentée, telles des baleines échouées dans un golfe tourmenté de récifs et d’ennui.

La grive ouvre ses ailes, s’enivre de soleil et de fruits grappillés sur les promesses des sorbiers.

Les assauts du soleil dissipent doucement les nuages affaiblis qui se couchent, s’allongent et s’étirent dans une symphonie de croches argentées ; chacun reprend sa place sur les portées ensoleillées de ce nouveau matin du monde.

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