Dix sept heures à la station Anvers, une minute de plus ou de moins, mais qu’est-ce qu’une minute dans le déferlement d’un flux humain?

Les hommes vivent dans l’immédiat sans se rendre compte que le temps dans lequel ils vivent ne dure qu’une minute.

C’est surement pour cela que le temps venu leur vie se jouera d’une minute à l’autre à la  minute près.

Mais oublions le futur, ils sont dans le présent, et le présent est un temps qui se conjugue à l’imparfait pour composer le passé, puisque le temps est un remède de grammaire.

Dix sept heures et la marée humaine roule et s’écoule par la rue Briquet.
La rue Briquet
la rue pleine de pierres
de pierres à briquet
qui enflamment les sens
et font perdre la boule
aux badauds qui déboulent
sur le boulevard  Rochechouart.

Ils ont tous vu Montmartre.

Il y a ceux qui le voyaient pour la première fois
ceux qui le voyaient pour se souvenir
ceux qui n’ont jamais vu la mer
ceux qui n’aiment pas les sushis
celle qui rêve d’une autre vie
celle qui a perdu son boulot
celle qui ne veut pas en chercher
pour ne pas risquer de le perdre.

et puis il y a cet homme venu pour la voir
qui traverse le boulevard
à contresens du monde.

Cet homme qui se dit
à cet instant précis
qu’elle est là quelque part
dans cette rue, dans cette ville
ou sur le boulevard
et qu’elle ne veut pas le voir
en tout cas pas ce soir
ni aucun autre soir.

et il va voir Montmartre
juste histoire de voir….